Le petit bus aux sièges défoncés (mais équipé d’un écran de télé diffusant en boucle des pages de pub pour téléphones portables et autres délices de ce genre) qui me conduit de l’aéroport au centre ville, sur des voies express relativement peu empruntées, traverse d’abord des banlieues bien banales, avec des alignements de bâtiments semblables flambant neufs. La métropole de Shanghai grossit…
Fuite sur l’eau
Voilà, il est environ 18 h, il fait nuit, c’est le premier jour de l’année 2005 et je viens d’atterrir à Shanghai ; pas seulement pour présenter mes meilleurs vœux d’ici… J’avais envie de revoir cette cité, trop rapidement visitée en juin 1989, période mouvementée en Chine ; le mécontentement grondait alors dans toutes les villes du pays. Qui ne se souvient pas des images diffusées sur les manifestations du 4 juin 1989, place Tiananmen à Pékin ?
La colère avait alors aussi touché Shanghai, qui s’était brutalement arrêtée de vivre : bus et trolleybus en travers des rues, manifestations… quatre jours après avoir pénétré dans Pékin, les chars investissaient les lieux stratégiques de l’autre grande cité chinoise, mais je n’étais plus là pour le voir, embarqué sur le dernier bateau (les trains et les avions ne circulaient plus) en partance pour Hong Kong.
Une réincarnation rapide de Shanghai
C’est seulement en écoutant la BBC pendant les trois jours en mer que nous avons pris conscience de l’ampleur du mouvement et de la violence de la répression. Sur place en effet, il était très difficile d’échanger et de comprendre.
Tout cela fait un peu « grand-père », un grand-père qui, dans son bus défoncé, en prend plein les mirettes en approchant du centre : débauche de gratte-ciel dont certains ont des formes bien improbables (comment ça tient ?), ponts enjambant la Huangpu – la rivière qui traverse Shanghai – d’une grande modernité, éclairages sophistiqués… la réincarnation de la ville a été rapide et brutale. Heureusement, il me reste un repère : le Bund, l’intouchable promenade de Shanghai le long de la Huangpu.
Architecture osée
Le Bund, c’est quoi ? Une promenade dans le passé de la ville, où s’alignent des immeubles (beaucoup datant des années 20) témoins de la forte présence des étrangers à cette période et symboles de la ferveur commerciale de ce port gigantesque.
Hôtel Art déco, bâtiment des douanes surmonté d’une horloge inspirée de celle de Big Ben et immeubles de grandes banques voisinent avec le siège du défunt North China daily news (le principal journal en anglais du pays du milieu du XIXe au milieu du XXe siècle) ou l’ancien consulat de Grande-Bretagne. De nuit, les façades sont magnifiquement éclairées.
En face, de l’autre côté de la rivière, les immeubles ont quant à eux moins de dix ans et toutes les prouesses architecturales semblent permises… je vais aller me promener la tête en l’air là-bas bientôt.
C’était mon 1er janvier ; conscient d’avoir raté plein de bisous mouillés et toutes les bonnes choses qui vont avec, mais très content de m’en être passé !